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Dans notre nouveau numéro consacré à l’engagement, nous avons demandé à cinq penseurs ce qu’ils feraient si le RN arrivait au pouvoir en 2027. La philosophe Catherine Malabou prône, elle, une “désertion active” faite d’entraide citoyenne et associative… inspirée de la tradition anarchiste.
Catherine Malabou : “Face à l'extrême droite, il est possible d’élaborer une certaine plasticité insurrectionnelle dans les marges du pouvoir”
Dans notre tout nouveau numéro consacré à l’engagement, nous avons demandé à cinq penseurs ce qu’ils et elles feraient si le Rassemblement national arrivait au…
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“Nouvelle Vague” : le mythe de la jeunesse www.philomag.com/articles/nou...
“Nouvelle Vague” : le mythe de la jeunesse
“Nouvelle Vague” : le mythe de la jeunesse hschlegel ven 10/10/2025 - 17:42 En savoir plus sur “Nouvelle Vague” : le mythe de la jeunesse Nouvelle Vague, le dernier film de Richard Linklater à l’affiche en ce moment, ne trompe pas son monde avec un tel titre. Il y est bien question de Godard, Seberg, Belmondo… et de toute la bande, en retraçant la genèse d’une petite révolution au cinéma : le tournage d’À bout de souffle. Pour Ariane Nicolas, le cinéaste réussit à proposer une mise en scène joueuse et rythmée, qui évoque la patte Godard sans tomber dans le pastiche. [CTA1]   Ce texte est extrait de notre newsletter hebdomadaire « Par ici la sortie » : trois recommandations culturelles, éclairées au prisme de la philosophie, chaque vendredi soir. Abonnez-vous, elle est gratuite !   « Ah, la jeunesse ! La grande affaire de Richard Linklater. Le réalisateur de Dazed and Confused, de la trilogie des Before (Sunrise, Midnight, Sunset) et de Everybody Wants Some filme à nouveau une bande de jeunes avec Nouvelle Vague, présenté au dernier Festival de Cannes. Et pas n’importe quelle bande : celle qui a tourné À bout de souffle, le premier long-métrage de Jean-Luc Godard (incarné ici par le remarquable Guillaume Marbeck). En 1959, Godard n’a que 28 ans mais se sent déjà vieux : “C’est trop tard”, se lamente-t-il devant la troupe des Cahiers du cinéma. Ses acolytes Truffaut, Rohmer ou Chabrol ont déjà sorti leurs premières œuvres. Lui, plus exigeant et crâne, attend son moment. Gauguin, qu’il cite, disait : “L’art, c’est soit du plagiat, soit la révolution.” Godard trouve un producteur, pique une idée dans le Nouveau Détective et fait enfin sa révolution. Vingt jours de tournage avec Jean Seberg et Jean-Paul Belmondo, pas de scénario ni de prise de son directe, des acteurs déboussolés par un cinéaste parlant en aphorismes et qui fait ce qu’il veut. L’improvisation, seule méthode pour “saisir la réalité au hasard” ? Godard, qui filme un voleur en cavale, est lui-même un petit filou. S’il prétend rechercher la “spontanéité” et “l’inattendu”, son film fonce en sens inverse : les dialogues ont l’air artificiels, le son est rajouté en post-production, le montage est saccadé. Il veut incarner un nouveau présent mais vise surtout “l’immortalité”... Le titre choisi témoigne de ces paradoxes : jeune, son personnage est déjà à bout de souffle ! “Prouvons que le génie n’est pas un don mais l’issue qu’on invente dans les cas désespérés”, disait Sartre – cité aussi. Dans Nouvelle Vague, la jeunesse apparaît pour ce qu’elle est : un mythe élaboré en temps réel. Toute jeunesse s’invente et se déploie en fonction du mythe qu’elle entend (plus ou moins consciemment) devenir. Comme tout mythe, montre Linklater, la jeunesse est un mensonge. Mais un mensonge qui dit vrai. »   Nouvelle Vague, de Richard Linklater, avec Guillaume Marbeck, Zoey Deutch et Aubry Dullin. En salles. octobre 2025
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María Corina Machado : prix néolibérale de la paix www.philomag.com/articles/mar...
María Corina Machado : prix néolibérale de la paix
María Corina Machado : prix néolibérale de la paix hschlegel ven 10/10/2025 - 15:22 En savoir plus sur María Corina Machado : prix néolibérale de la paix Trump espérait le recevoir, mais c’est finalement la Vénézuélienne María Corina Machado qui s’est vu décerner le prestigieux prix Nobel de la paix pour son combat « en faveur d’une transition juste et pacifique de la dictature à la démocratie ». Portrait d’une dissidente qui bouscule les repères de la politique… et du Nobel.  [CTA2]   Selon le président du comité Nobel norvégien Jørgen Watne Frydnes, « María Corina Machado est l’un des exemples les plus extraordinaires de courage civique en Amérique latine ces derniers temps ». Née en 1967, fille d’un riche homme d’affaires à la tête d’une grande compagnie d’électricité et d’entreprises sidérurgiques, María Corina Machado est devenue, au fil des années, une oppposante acharnée au régime de Nicolás Maduro. Elle « a été une figure clé de l’unité au sein d’une opposition politique autrefois profondément divisée » ; en octobre 2023, elle remportait la primaire de l’opposition en vue de l’élection présidentielle, avant que sa candidature ne soit interdite. Dès lors, « Madame Machado a été contrainte de vivre dans la clandestinité. Malgré les graves menaces qui pèsent sur sa vie, elle est restée dans son pays, un choix qui a inspiré des millions de personnes ». L’héritage ambigu de Bolivar Elle est depuis surnommée la libertadora (« libératrice »), en référence au libertador Simón Bolívar, le père de l’indépendance des nations sud-américaines. Si l’héritage de ce dernier est également revendiqué par le camp adverse, qui voit en lui un symbole de la lutte contre l’impérialisme étranger, les convictions politiques de Bolívar se rapprochent davantage de celles de Machado que des politiques socialistes de Maduro et de son prédécesseur Hugo Chavez. Influencé par la philosophie des Lumière, BolÍvar était un partisan du libéralisme, critique du dirigisme économique. S’il fut tout particulièrement lecteur de Rousseau - parfois considéré comme une précurseur du socialisme -, il en retint surtout le « pouvoir des lois, plus puissant que celui du tyran, parce que plus inflexible », mais il se défiera des idées de participation directe du peuple au pouvoir politique. Du point de vue de Machado, le régime de Maduro emprunte à Bolívar ce qu’il y a de plus contestable et en rejette ce qu’il y a de meilleur : alors qu’il se présente comme un démocrate, Maduro n’a aucun respect pour la souveraineté populaire ; à la force de la loi, son régime autoritaire et policier a substitué le règne de l’arbitraire. Une opposante néolibérale À ce régime défaillant, qu’elle accuse d’avoir ruiné le pays, María Corina Machado oppose une « philosophie [qui] met l’accent sur la séparation des pouvoirs, l’indépendance de la justice la presse libre et la protection des libertés civiles », écrit Alex Pierceman dans Maria Corina Machado and The Struggle for Democracy in Venezuela (« María Corina Machado et le combat pour la démocratie au Vénézuela »). Présentée comme une défenseur de la démocratie et de l’État de droit – elle avait déjà été récompensée du prix des droits de l’homme Václav-Havel en 2024 en tant que porte-voix des « aspirations claires du peuple vénézuélien à des élections libres et équitables, au respect des droits civils et politiques et à l’État de droit » –, Machado est avant tout une libérale ou, selon certains observateurs, une néolibérale. On ne s’en étonnera pas : l’Amérique du Sud a été l’un des premiers espaces d’expérimentation du néolibéralisme, sous la houlette des Chicago Boys. La philosophie de Machado « est enracinée dans les principes du capitalisme de libre marché, qu’elle considère comme le moyen le plus efficace de restaurer l’économie ébranlée du Vénézuela et d’améliorer la qualifie de vie de ses citoyens », résume Alex Pierceman. « Sa philosophie est fondée sur la croyance que les marchés, quand on leur permet de fonctionner librement, sont le mécanisme le plus efficace pour l’allocation des ressources et la génération de richesses. » Admiratrice de Javier Milei… et proche de partis d’extrême droite Plus qu’à Bolívar, c’est à l’ultra-libérale Margaret Thatcher, la « dame de fer » britannique, Première ministre de 1979 à 1990, qu’on la compare le plus souvent. Machado lui rendait hommage dans un tweet de 2013 : « Margaret Thatcher a eu le courage de défendre ses valeurs toute sa vie contre tous ceux qui s’opposaient à elle. » Elle ne cache pas son affection pour les autres grandes figures du néolibéralisme : la philosophe Ayn Rand et les économistes Ludwig von Mises et Milton Friedman. Dans un post hommage de 2019, elle écrivait : « Aujourd’hui, nous nous souvenons du lauréat du prix Nobel d’économie Milton Friedman à l’occasion de son 107e anniversaire, pour sa grande contribution à la liberté économique et à ses idées qui fonctionnent ! Il suffit de regarder ce qu’elles ont accompli au Royaume-Uni, au Chili et aux États-Unis, en créant de la richesse au bénéfice de la société dans son ensemble. » Autant de figures partageant à différents degrés un rejet de l’interventionnisme étatique et la promotion d’une liberté économique qui, si elle trouve à se coupler à la défense de la liberté politique dans certains contextes autoritaires dirigistes, finit souvent par buter à l’exigence démocratique. La poursuite des intérêts particuliers, dans son individualisme, se heurte aux contraintes de l’intérêt collectif. Le droit, garantie de la libre entreprise soustraite à l’emprise de l’État, peut vite devenir un « problème » dès lors que la loi, enracinée dans la souveraineté populaire, entend réguler, réglementer. Parmi ses contemporains, María Corina Machado a également salué la victoire de Javier Milei, et en août dernier, a remercié le président libertarien d’Argentine pour son « ferme soutien » pour « la liberté et la démocratie ». Que les deux trouvent à s’entendre face à un ennemi commun – le « régime narco-terroriste » de Maduro – ne fait évidemment pas de Machado une libertarienne sans concession. Mais sa philosophie s’inscrit, assurément, dans cette constellation de pensées plus ou moins radicales qui défendent d’abord, au nom de la liberté et de la démocratie, une libéralisation de l’économie. Comme Milei, Machado soutient le parti Vox, qui entend fédérer les droites radicales d’Espagne et d’Amérique latine – elle a été, en 2020, signataire de la charte de Madrid initiée par la formation politique. Bref, si Trump n’a pas remporté le Nobel de la paix, le prix a échu à une femme politique qui partage à certains égards sa vision du monde. octobre 2025
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“Keep calm and carry cash” : pourquoi faut-il toujours avoir 70€ en liquide à portée de main ? www.philomag.com/articles/kee...
“Keep calm and carry cash” : pourquoi faut-il toujours avoir 70€ en liquide à portée de main ?
“Keep calm and carry cash” : pourquoi faut-il toujours avoir 70€ en liquide à portée de main ? hschlegel ven 10/10/2025 - 12:00 En savoir plus sur “Keep calm and carry cash” : pourquoi faut-il toujours avoir 70€ en liquide à portée de main ? Dans sa dernière note, la Banque centrale européenne recommande à tous les citoyens européens d’avoir toujours chez eux 70 euros en espèces, de sorte à pouvoir faire face à une crise imprévue. À suivre La Philosophie de l’argent de Georg Simmel, ce conseil témoigne d’un recul de la confiance dans l’État. [CTA2]   « Keep calm and carry cash » (« Restez calme et conservez du liquide sur vous ») : un titre aux allures de western pour la dernière note de la Banque centrale européenne (BCE), publiée le 23 septembre 2025. Le texte incite les ménages à mettre de côté suffisamment d’argent liquide pour couvrir leurs besoins élémentaires pendant 48 à 72 heures en cas de force majeure, soit entre 70 et 100 €. Francesca Faella et Alejandro Zamora-Pérez, les deux économistes derrière ce rapport, tirent des leçons de quatre crises majeures qui ont émaillé le XXIe siècle en Europe : la crise grecque de 2015, la pandémie en 2020, la guerre en Ukraine en 2022 et le blackout qui a privé une partie de l’Espagne d’électricité en avril dernier. À chaque fois, le recours systématique et massif aux liquidités s’est avéré un levier individuel pour faire face à l’incertitude, ainsi qu’un formidable tampon pour ménager les échanges à l’échelle locale. Ils vont jusqu’à parler de l’argent en espèces comme d’une « roue de secours monétaire » : inutile dans la plupart des cas, mais essentielle en cas de choc systémique – cyberattaque, panne, crise bancaire. Bizarre, quand on sait que le refuge dans le cash est généralement un symptôme de défiance envers les institutions. Du métal précieux au bout de papier : une question de confiance Le philosophe allemand Georg Simmel (1858-1918) montre dans sa Philosophie de l’argent (1900) que le passage de l’argent-substance à l’argent-signe n’a pu s’effectuer que lorsque s’était établi un certain lien de confiance naturelle entre l’individu et la société. Lorsque l’État central n’était pas constitué et qu’aucune autorité ne garantissait la stabilité de la monnaie, les fonctions monétaires étaient remplies par un support qui avait en soi de la valeur (par exemple, de l’or ou un métal précieux). Cela limitait la création monétaire, tout en étant un gage de stabilité. Si les institutions étatiques font leur travail, nul besoin de se réfugier dans la matérialité – on peut se contenter de passer à la caisse les yeux fermés, puisque l’État garantit silencieusement tous mes achats. Pour Simmel, cette oscillation de l’abstraction vers la matière est significative : « L’argent ne devient véritablement tel que dans la mesure où la substance recule ». Autrement dit, la valeur monétaire s’établit quand l’attachement à la substance (le métal, la matérialité) s’efface ; mais revenir à insister sur la substance (au cash) révèle-il un retour de la défiance face à l’abstraction du crédit et aux promesses sociales de stabilité ? Pas de conclusion hâtive ! Que la BCE conseille aux citoyens de stocker quelques espèces revient donc à réintroduire discrètement de la matérialité, là où la confiance devait suffire. Pas sûr, cependant, que la BCE ait préparé un scénario de fin du monde. Elle s’est d’ailleurs engagée depuis quelques années à développer un euro numérique, qui assurerait la transition vers l’ère digitale tout en préservant la souveraineté stratégique de l’Europe. La prudence monétaire est ici une stratégie de robustesse low tech plutôt qu’un coup de tonnerre alarmant. octobre 2025
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László Krasznahorkai, un Nobel qui met l’apocalypse en question
László Krasznahorkai, un Nobel qui met l’apocalypse en question hschlegel ven 10/10/2025 - 10:14 En savoir plus sur László Krasznahorkai, un Nobel qui met l’apocalypse en question László Krasznahorkai a été couronné par l’académie Nobel le 9 octobre 2025, à 71 ans, pour son « son œuvre fascinante et visionnaire qui, au milieu de la terreur apocalyptique, réaffirme le pouvoir de l’art ». Philippe Garnier nous introduit à l’œuvre de cet écrivain hongrois qui, dans la veine de Kafka et de Thomas Bernhardt, se saisit des menaces en mode interrogatif.  [CTA2]   Qu’est-ce qu’une apocalypse ? Dans la langue courante, il s’agit d’une fin du monde violente, mais ce mot, dans son sens littéral, signifie aussi « dévoilement » ou « révélation ». Cette ambivalence, l’œuvre de László Krasznahorkai – couronné par le prix Nobel de littérature 2025 – la porte à son paroxysme. Dans La Mélancolie de la résistance, son deuxième roman publié en 1989, un malaise indéfinissable règne sur une petite ville de province hongroise. Chaos visible ou désintégration sournoise ? Dans le sillage de Franz Kafka et de Thomas Bernhardt, la menace, vécue par différents personnages, n’est jamais nommée, mais elle prend figure dans une baleine empaillée, exhibée par un cirque. Susan Sontag avait alors qualifié l’auteur de « maître de l’apocalypse ». Depuis, l’œuvre de Krasznahorkai n’a cessé de faire surgir des voix d’imprécateurs, de prophètes à la vie souvent insignifiante, annonçant quelque chose qui relève de la fin du sens plutôt que de la fin matérielle du monde. Cette noirceur, cet effacement de tout horizon, cette description asphyxiante de la « non-vie », atteignent sans doute leur point culminant avec Le baron Wenckheim est de retour, publié en français en 2023. “L’œuvre de Krasznahorkai est emplie d’imprécateurs, de prophètes à la vie souvent insignifiante, annonçant quelque chose qui relève de la fin du sens plutôt que de la fin matérielle du monde” Philippe Garnier   Mais à ce fil « apocalyptique » – au sens de la langue courante – se noue un autre fil, attentif au dévoilement, à la révélation. Ainsi, Seiobo est descendue sur terre, recueil de nouvelles paru en français en 2018, met en scène des guetteurs de sens, déçus mais obstinés. Un gardien du Louvre s’y sent inexplicablement lié à la Vénus de Milo. Il essuie les railleries de ses collègues et contemple toute sa vie cette œuvre issue d’un monde ancien, disloqué, effacé. Un restaurateur de sculptures japonais médite sur une statue du Bouddha endommagée et se demande comment lui rendre sa mystérieuse aura. Très longues mais scandées, se chargeant de souffle au lieu de s’épuiser en chemin, les phrases de Krasznahorkai portent à la perfection la recherche inlassable d’un sens non pas transcendant mais immanent au monde, qui ne se laisse entrevoir que pour mieux se dérober. C’est aussi de l’histoire – celle de la Hongrie, son pays natal où il est né en 1954, et au-delà, l’histoire de l’Europe – que se nourrit la pensée de l’écrivain. Dans un entretien avec Damien Marguet, publié par la revue Passés Futurs en 2020, l’écrivain compare la vérité des historiens à celle de l’art et de la religion. Il dit : “Ces trois approches intellectuelles parlent de ce combat, et non de la vérité. Vis-à-vis de ces trois formes d’expression, nous n’avons qu’une seule attitude à adopter : faire passer leurs messages du mode affirmatif au mode interrogatif. Pour chaque phrase de Bouddha, de Dante et d’Hérodote, nous devons remplacer le point final par un point d’interrogation” László Krasznahorkai, entretien avec Damien Marguet, à lire en intégralité sur le site de recherches en sciences sociales Politika.io (2020) Tel serait l’un des sens de cette œuvre à plusieurs visages : exorciser les cauchemars légués par l’histoire humaine, en déblayer les scories, pour faire place nette à une question – sans réponse, certes, mais rendue à sa pureté. octobre 2025
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Les deux nez du pouvoir www.philomag.com/articles/les...
Les deux nez du pouvoir
Les deux nez du pouvoir hschlegel jeu 09/10/2025 - 18:44 En savoir plus sur Les deux nez du pouvoir « Depuis dix jours, c’est l’hécatombe à la rédaction : nous sommes tous tombés malades, un à un. Les gorges se raclent, les morves dégoulinent, les éternuements tonitruent… et bien sûr, les nez se bouchent. Mais quel(s) nez ? [CTA1] ➤ Vous lisez actuellement la Lettre de la rédaction de Philosophie magazine. Pour la recevoir directement dans votre boîte mail, abonnez-vous ! Cette newsletter est quotidienne et gratuite. En étudiant la question, j’ai découvert la bipolarité des narines – une curiosité méconnue qui, me semble-t-il, pourrait nous aider à comprendre la congestion politique actuelle. “Nous ne possédons pas un, mais deux nez.” J’avoue avoir vécu une sorte d’épiphanie en lisant cette phrase dans un article du magazine The Atlantic, intitulé “Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le nez bouché”, alors que j’effectuais des recherches Google pour vérifier l’efficacité des pschitt d’eau de mer et autres placebos sur mes sinus encombrés. En effet, trop de gens ignorent que nos deux narines forment des organes indépendants, à l’instar des yeux ou des oreilles, arguait l’autrice de l’article. Nos deux “nez”, séparés par une cloison, ouvrent chacun sur un réseau de sinus, ces cavités nasales qui s’étendent des joues au front. Une indépendance qui vise sans doute à limiter les infections : nos narines ayant pour fonction de filtrer et d’humidifier l’air, elles ont intérêt à ne pas se contaminer l’une l’autre. Cette mise au point m’a permis de préciser ma petite phénoménologie du rhume. Contrairement à ce que l’on croit, nous n’avons pas “le nez bouché”. D’abord parce que nous avons deux nez, mais aussi parce que ce ne sont pas nos sécrétions qui bouchent cet organe imaginaire, mais le gonflement des muqueuses nasales. Celles-ci fonctionnent comme les tissus érectiles du pénis : elles gonflent et dégonflent régulièrement, en fonction de l’afflux de sang. Et – génie du corps humain – sachez que nos narines gonflent en alternance. Vous constaterez que lorsque vous êtes enrhumé, vous avez toujours une narine davantage bouchée que l’autre ; ce phénomène n’a rien à voir avec la quantité de mucus que vous croyez exhumer de votre appendice en vous mouchant frénétiquement, mais avec ce gonflement interne, accru par les allergies et infections, qui induit la sensation de nez bouché. C’est pourquoi il est inutile de gaspiller vos mouchoirs : expulser la morve ne résout en rien le problème. Ce n’est pas tout : ces jumeaux de “nez” travaillent toujours en alternance. Même en l’absence de rhume, nos narines communiquent pour se répartir le boulot et semblent fonctionner selon un cycle régulier. Tandis que l’une respire à pleins poumons, l’autre se gonfle, et ainsi de suite, toute la sainte journée. Pourquoi cette dualité ? Après tout, l’odorat n’a pas besoin de multiplier les points d’entrée de ses organes. Nous avons deux yeux pour faire la mise au point, deux oreilles pour entendre en stéréo… Certes, la nature adore la symétrie. Mais quel est l’intérêt d’avoir deux nez ? D’après les chercheurs, il semblerait que ce rythme favorise la régénération de chaque réseau, en stimulant son système immunitaire. À chaque fois que les tissus désenflent, les cavités libèrent des anticorps, ce qui leur permettrait d’assurer convenablement leur mission pendant que leurs confrères de l’autre côté se reposent. Étourdie par ces découvertes, le cerveau embué par le rhume, je me suis surprise à méditer sur ces mystères de la nature et à me demander quelle leçon nous pourrions bien tirer de ce système d’alternance d’érections nasales. S’il y a bien une chose qui frappe dans la situation politique actuelle, c’est l’échec cuisant de l’abolition du bipartisme dont avait rêvé le macronisme. À vouloir prétendre qu’on pouvait tout faire “en même temps”, en mobilisant simultanément les énergies de droite comme de gauche, n’a-t-on pas fini par épuiser les ressources et les capacités de régénération de nos forces politiques ? Il est facile de dénoncer le système des partis, ses oppositions frontales et son étanchéité maladive. Or peut-être avons-nous précisément besoin de cette bipolarité pour faire respirer notre corps politique. Certes, la France doit présenter un visage uni, trancher dans le vif, se donner un cap, notamment en matière de politique extérieure. Mais nous aurions tort de croire qu’il suffit d’un président pour avoir du nez, surtout lorsqu’une majorité de citoyens l’ont dans le pif. Lorsqu’on néglige la spécificité des deux camps, c’est l’ensemble du régime qui se congestionne. À quand le retour du bipartisme ? » octobre 2025
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“Une vie égale une vie” : un principe mis à mal au Proche-Orient www.philomag.com/articles/une...
“Une vie égale une vie” : un principe mis à mal au Proche-Orient
“Une vie égale une vie” : un principe mis à mal au Proche-Orient hschlegel jeu 09/10/2025 - 15:00 En savoir plus sur “Une vie égale une vie” : un principe mis à mal au Proche-Orient C’est une asymétrie qui est au centre de l’accord de cessez-le-feu venant d’être conclu entre le Hamas et Israël, sous l’égide de Donald Trump : les 47 otages israéliens restant vont être échangés contre près de 2 000 prisonniers palestiniens. Faut-il donc penser qu’une vie ne vaut pas une vie ? Tentative d’explication avec Judith Butler, George Orwell et Francis Wolff.  [CTA2]   Lors de son discours de reconnaissance de l’État palestinien, qui s’est tenu dans l’enceinte des Nations unies le lundi 22 septembre, Emmanuel Macron en appelait à conjurer « la possibilité d’un double standard », terme qui désignait en l’occurrence la façon dont les États occidentaux auraient tendance à traiter les morts civils différemment, selon leur nationalité, israélienne ou palestinienne, russe ou ukrainienne. Il répondait donc par cette formule de prime abord limpide – « une vie égale une vie ». Que signifie cette phrase, au fond ? Que veut-on dire, quand on place le signe « égal », entre deux « vies » ? Voici des pistes d’interprétation possibles. Une vie = une vie La formule « une vie égale une vie » peut d’abord vouloir dire « une vie = une vie ». Le mot « égal » employé dans cette phrase est alors considéré comme un terme strictement arithmétique. Si l’on considère que toutes les vies sont égales sur un plan mathématique, on doit compter les vies pour agir moralement. En suivant cette option éthique, on aura par exemple tendance à estimer qu’il vaut mieux tuer une personne, si cela nous permet d’en sauver cinq (en réponse au célèbre dilemme du tramway). Autrement dit, une vie ne peut valoir qu’une seule vie – jamais cinq. Cette interprétation de la formule se fonde sur une éthique dite conséquentialiste. Elle se focalise sur les conséquences des actions, non sur les actions elles-mêmes. Ce qui compte, dans le dilemme du tramway, ce n’est pas l’acte d’avoir tué quelqu’un, mais sa conséquence : avoir sauvé cinq autres personnes. L’égalité mathématique implique notamment de penser l’éventualité des « dommages collatéraux ». Dans son essai L’Influence de l’odeur des croissants chauds sur la bonté humaine (2011), le philosophe Ruwen Ogien explique que ce cas correspond à ce que l’on appelle « la doctrine du double effet ». Si l’on en croit cette doctrine, les dommages collatéraux sont « moralement permis » dans la mesure où ils ne sont pas visés en premier lieu par les belligérants. Autrement dit, on peut tuer, si notre but était d’éliminer quelqu’un qui risquait de tuer encore plus de gens. Comme le souligne le philosophe, la doctrine du double effet nous oblige à trancher d’autres questions : par exemple, l’action de causer la mort vise-t-elle uniquement à « détourner une menace » ou en crée-t-elle une nouvelle ? Cette action est-elle « impersonnelle » (elle ne vise pas d’individus particuliers) ou « personnelle » ? Et enfin, la mort de ces personnes est-elle la conséquence tragique de la volonté de sauver plus de gens ou est-elle un moyen pour atteindre un autre objectif ? “Si la ‘valeur’ d’un prisonnier est inférieure à celle d’un otage, c’est que la prise d’otage met directement au défi l’État dans sa fonction de protection de ses ressortissants”   La notion même de « dommage collatéral » nous place aux limites de l’expression « une vie égale une vie ». D’un côté, elle confère un primat absolu à la question d’égalité. Dans un monde où il faut préserver chaque vie sur le plan numérique, il faut faire tout ce qui est en notre pouvoir pour sauver le plus de vies possibles, qu’importent les moyens et les sacrifices que cela implique. D’un autre côté, « une vie égale une vie », formule (trop ?) simple peut dans certains contextes effacer toute nuance. En insistant sur l’égalité, on met l’accent sur une forme de réciprocité qui peut se rapprocher de la loi du talion (« œil pour œil, dent pour dent »). Si une vie « de mon camp » a été éliminée, je dois éliminer une vie de l’autre camp. L’égalité des vies annoncée comme but risque alors d’impliquer un « rééquilibrage numérique » sous forme de vengeance, qui ne va pas sans une forme de violence archaïque. Dans un conflit ancestral comme celui qui dévaste le Proche-Orient, l’usage de l’expression n’est pas hasardeux. Il nous renvoie à un monde ancien, à des règles ancestrales qui peuvent sembler paradoxalement contradictoires avec toute volonté pacifiste. Le risque de calculer les vies « Une vie égale une vie » peut ainsi devenir un moteur de guerre et se renverser en son contraire, légitimant les pires actes de barbarie. Le terme de « dommage collatéral » illustre l’idée selon laquelle les morts ne se valent jamais, ni dans les faits, ni dans les mentalités. En plus de réifier une personne (de la renvoyer à l’état d’objet), il réduit certains morts à des « maux nécessaires ». Comme l’explique Judith Butler dans son essai Ce qui fait une vie (La Découverte, 2010) : “Ceux que nous tuons ne sont ni tout à fait humains, ni tout à fait vivants, ce qui veut dire que nous ne ressentons ni la même horreur ni la même indignation devant la perte de leurs vies que devant la perte des vies qui entretenaient une similitude nationale ou religieuse avec la nôtre” Judith Butler, op. cit. Dans le monde présent – et particulièrement en temps de guerre – les vies ne se valent jamais. La guerre contribue à créer des « cadres » interprétatifs qui impliquent que certaines vies valent cher, et que d’autres ne valent rien, comme l’écrit encore Butler. “La guerre ou plutôt les guerres actuelles s’appuient tout en la perpétuant sur une manière de diviser les vies entre celles qui valent d’être défendues, valorisées et pleurées lorsqu’elles sont perdues, et celles qui ne sont pas tout à fait des vies, pas tout à fait valables, reconnaissables ou même ‘pleurables’” Judith Butler, ibid. Cette inégalité entre les vies s’observe ces derniers temps de façon très concrète : dans l’accord de cessez-le-feu qui vient d’être conclu entre le Hamas et Israël sous l’égide de Donald Trump, il est convenu d’échanger les 48 otages israéliens détenus par le Hamas (dont vingt seraient encore en vie) contre la libération de 250 prisonniers palestiniens purgeant des peines de réclusion à perpétuité, ainsi que 1 700 Gazaouis arrêtés après le 7 octobre 2023. Les chiffres sont éloquents : si l’on en croit cet accord présenté par le président des États-Unis, une vie d’Israélien vaut presque… deux mille vies de Palestiniens. Derrière cette dissymétrie arithmétique, il y a une différence de nationalité mais aussi de condition : en général, la vie ou la survie d’un otage captif de terroristes est censée être plus précaire et plus menacée – et donc objet d’une plus grande sollicitude – que celle des prisonniers d’un État, quels que soient les manquements dont celui-ci peut faire preuve à l’endroit de ceux-là. C’est que la prise d’otage met directement au défi l’État dans sa fonction de protection de ses ressortissants. Par conséquent, le statut – et donc la valeur – d’un otage pour un État n’est pas équivalent à celui d’un prisonnier, qui plus est si ce prisonnier est considéré comme étranger. “Si l’on considère que nous avons tous besoin les uns des autres, parce qu’une vie isolée est foncièrement précaire, alors en sauvant mon voisin, je sauve aussi ma propre vie. Nos vies sont égales, car identiques et interdépendantes”   Mais il existe d’autre manières de creuser des disparités objectives entre les existences, comme le critère de l’âge. Pour une compagnie d’assurances par exemple, un jeune en bonne santé sera considéré comme beaucoup plus rentable qu’une personne âgée à la santé fragile, qui devra donc payer plus cher. De même, si un médecin doit choisir entre le sauvetage d’une personne âgée ou celle d’un individu plus jeune, il aura tendance à choisir le second. Aux États-Unis, et comme le rappelle Mathias Delori dans son livre Ce que vaut une vie, l’inégalité concrète entre la valeur des vies s’est observée sur le plan économique au moment des attentats du 11-Septembre. Certaines familles ont reçu de la part de l’État américain des dédommagements financiers beaucoup plus importants que d’autres. Leur vie n’était pas chiffrée de la même manière.  Nos vies sont les mêmes Pour sortir de cette logique comptable parfois délétère et dangereuse, on peut donner un autre sens au mot « égal » : ne plus y voir un rapport d’égalité mathématique entre les vies, mais un rapport d’identité. Certes, nous n’avons pas la même vie. Nous vivons des choses différentes en des lieux variés. Mais le fait d’être en vie, et de se maintenir en vie : ce fait simple, brut, immédiat, est le même pour tous les êtres. Nous avons en commun la possession d’une vie. Et ce point commun nous rend particulièrement vulnérable. Nos vies, explique Butler, ont pour point commun d’être « précaires ». Autrement, une vie seule ne fait pas long feu. La vie qui se maintient en vie, c’est-à-dire la vie vivable, a besoin de tout un panel de conditions pour se maintenir. Et ces conditions ne peuvent être atteintes sans une intime solidarité. Nos vies sont précaires, vulnérables, sans cesse menacées. Tel est leur point commun, leur essence. Ce passage de l’égalité à l’identité entre les vies change notre manière de percevoir notre semblable. Je ne me contente pas de dire que ma vie a le même prix que celle d’un autre, j’affirme qu’elle est identique à celle de cet autre. Cela signifie que nous sommes dans le même bateau. Parce que ma vie est aussi précaire que celle de mon voisin, j’ai besoin de lui. Si je le sauve, ce n’est pas pour sauver « une vie », mais pour sauver la même vie que la mienne. En maintenant la possibilité de l’existence d’autres vies, je maintiens ma propre vie. Je suis intimement lié aux autres. Ce lien par lequel on s’identifie à autrui s’éprouve au quotidien, mais aussi à travers certaines expériences fondatrices. Dans son article « Réflexions sur la guerre d’Espagne » (1942), Georges Orwell raconte comment il a soudainement renoncé à tirer sur un ennemi de l’armée adverse, dans le cadre de la guerre civile espagnole (1936-1939), à laquelle il avait participé comme soldat. « [Cet] homme, se souvient Orwell, devait probablement porter un message à un officier, jaillit de la tranchée et se mit à courir, complètement exposé, sur le sommet du parapet. Il était à moitié habillé et, tout en courant, retenait son pantalon avec ses mains. » Et l’auteur d’en conclure : « Je m’abstins de tirer sur lui […] si je n’ai pas tiré, c’est en partie à cause de ce petit détail du pantalon. […] Un homme qui retient son pantalon à deux mains n’est pas un “fasciste” : c’est manifestement un semblable, un frère, sur lequel on n’a pas le cœur de tirer. » La vulnérabilité soudainement dévoilée d’un autre homme – devenu alter ego – crée une identification. Parce que le soldat prend conscience de la proximité qu’il entretient avec cet autre : il renonce à le tuer. Nous avons l’humanité en partage La formule « une vie égale une vie » se concentre sur la vie en elle-même, plus précisément le fait d’être en vie. Mais ce n’est pas seulement la vie qui nous relie entre nous, mais la possibilité de parler, de communiquer cette vie, et donc de permettre à autrui de se mettre à notre place. Là où Butler prend le critère très large de la vie en général, le philosophe Francis Wolff défend la valeur de la vie en ceci qu’elle est humaine. C’est selon lui notre humanité qui nous permet d’envisager l’autre non comme une altérité radicale, mais comme un autre soi-même. Notre valeur humaine provient selon Wolff de notre faculté de raisonner. Cette raison n’est pas la raison sèche, individuelle, mais la raison « dialogique », à savoir la raison qui nous permet de nous adresser à quelqu’un, de parler avec lui – de le comprendre et d’accéder à son point de vue. « Dans le monde de la raison dialogique, tout être humain vaut tout être humain », affirme ainsi le philosophe dans son essai La vie a-t-elle une valeur ? (Philosophie magazine Éditeur, 2025). “Dans le monde de la raison dialogique, tout être humain vaut tout être humain” Francis Wolff   Non seulement nous sommes égaux en tant qu’êtres humains, mais nous sommes capables d’expérimenter cette égalité, d’en avoir conscience. C’est ce que Wolff appelle « le principe de réciprocité », qui nous invite « à nous mettre à la place de tous ceux à qui nous pourrions nous adresser ». Cette faculté de projection nous permet de contrôler nos propres actions. Quand nous agissons mal, quand nous blessons quelqu’un, nous sommes capables de nous en rendre compte en adoptant « sur notre propre action “le point de vue de toute part” », écrit Wolff. « Une vie égale une vie » est donc aussi une maxime dont nous avons tous universellement conscience, en ceci même que nous sommes humains. Wolff en conclut : “C’est cela l’humanité. Ce n’est pas un sentiment exceptionnel. Non. C’est l’humanité sise en tous les êtres humains. La communauté virtuelle des personnes vivantes ou à venir est bien une communauté morale, et c’est la seule possible” Francis Wolff, La vie a-t-elle une valeur ? (2025) Si l’on revient à la formule d’Emmanuel Macron lors de la reconnaissance de l’État palestinien par la France dans l’enceinte de l’ONU à New York, on peut donc estimer qu’elle contribue à amorcer la reconnaissance de cette « humanité sise en tous les êtres humains », peu importe son lieu de vie ou sa nationalité. Encore reste-t-il à faire en sorte que cette expression « une vie égale une vie » ne soit plus seulement un vœu pieux mais une réalité concrète. octobre 2025
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La crise ou la stase ?
La crise ou la stase ? hschlegel mer 08/10/2025 - 17:32 En savoir plus sur La crise ou la stase ? « Politique, économique, institutionnelle : la crise semble omniprésente… Mais sommes-nous vraiment dans un régime de crise ?  [CTA1] ➤ Vous lisez actuellement la Lettre de la rédaction de Philosophie magazine. Pour la recevoir directement dans votre boîte mail, abonnez-vous ! Cette newsletter est quotidienne et gratuite. C’est la grande fatigue ! Le scénario semble digne d’une série à rebondissements depuis que Sébastien Lecornu a remis sa démission, avant de mener de nouvelles négociations sous ultimatum du président, qui menace lui-même de “prendre ses responsabilités” en cas d’échec. Tremblez… En réalité, l’histoire semble suffisamment répétitive pour lasser, après des mois d’atermoiements, à la recherche d’un gouvernement voire d’une politique. Peut-on parler de crise sans fin ? L’idée de “permacrise”, de crise permanente, s’avère contradictoire. La krisis désigne en effet, étymologiquement, un moment de décision, de séparation, qui permet de trancher. La crise pour les Grecs est salvatrice : elle met un terme à un moment de confusion. La crise d’adolescence nous fait par exemple sortir de l’enfance pour entrer dans l’âge adulte, avec plus ou moins de bonheur. Progressivement, le mot en est cependant venu à désigner non la tension vers la résolution, préparant sa sortie, mais le chaos lui-même. Pour Paul Ricœur, la crise contemporaine renvoie ainsi à un flottement temporel et existentiel. Comme il l’analyse dans un essai sur la crise, repris dans Politique, Économie et Société, “lorsque l’espace d’expérience se rétrécit par un déni général de toute tradition, de tout héritage, et que l’horizon d’attente tend à reculer dans un avenir toujours plus vague et plus indistinct, seulement peuplé d’utopies ou plutôt d’‘uchronies’ sans prise sur le cours effectif de l’histoire, alors la tension entre horizon d’attente et espace d’expérience devient rupture, schisme”. Bref, la crise contemporaine s’engouffrerait dans l’abîme creusé entre déstabilisation et immobilisme, entre le présent qui se dérobe et l’avenir qui s’efface. Crise de régime ou régime de crise ? La crise contemporaine renvoie donc à l’indécision. Elle ne présente pas d’issue. “La perte des repères du jugement, l’épuisement des réponses traditionnelles quant aux orientations vers l’avenir, l’intensification de l’accélération, la perception d’une incertitude portée à un point extrême : ces caractéristiques affectent la quasi-totalité de notre expérience contemporaine”, précise la philosophe Myriam Revault d’Allonnes dans La Crise sans fin. Essai sur l’expérience moderne du temps (2012). “Nous sommes fondés à nous demander – sans pouvoir y répondre de façon satisfaisante – si elles marquent un seuil d’époque ou si elles radicalisent et exacerbent le régime de crise qu’est structurellement la modernité.” De même, la crise que nous traversons, manifestée par la valse des gouvernements, prépare-t-elle l’émergence d’un nouveau monde – comme une sixième République ? Ou cette instabilité sans mouvement, où tout bouge sans que rien ne change depuis des mois, est-elle amenée à devenir notre condition ? Le cas échéant, nous pourrions nous inspirer des Grecs pour nommer l’époque. Dans La Cité divisée (1997), l’helléniste Nicole Loraux s’intéresse en effet à la stasis. Cette notion intraduisible désigne à la fois “agitation et immobilité”. Elle recouvre des “conflits immobilisés”. L’autrice le souligne : “D’un mot qui désigne l’immobilité stable, on passe à une notion qui implique désordre et confusion : la cité se divise, s’affronte à elle-même et, très vite, comme dans la mêlée homérique devenue furieuse, on ne sait plus à quel camp appartiennent les ennemis.” Mais curieusement, cette tentation de la guerre civile se trouve être aussi un “ciment de la communauté”. Car pour les Grecs, “ce qui paradoxalement unit […] pourrait bien être une certaine conflictualité”… à dépasser. Ainsi, “le politique dans son essence procèderait en ce sens d’un double processus, l’affirmation de la stasis et son refoulement”. Le monde grec n’est évidemment pas le nôtre. Néanmoins, avec “une pratique contrôlée de l’anachronisme”, selon l’expression de Nicole Loraux, ne peut-on pas se reconnaître dans cette situation politique “explosante-fixe”, celle de la stase (plutôt que de la crise), comme “ciment” paradoxal de notre communauté ? » octobre 2025
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🪧 Les philosophes s’écharpent depuis des siècles sur le pour et le contre de l’engagement. Rester en retrait, est-ce accepter l’injustice ? Peut-on militer pour ses seuls intérêts ? Doit-on accepter de renoncer à sa liberté ? …Le match des penseurs est dans “Philosophie magazine” !

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Robert Badinter : “L’abolition de la peine de mort est un pari sur la nature humaine que je crois gagné”
Robert Badinter : “L’abolition de la peine de mort est un pari sur la nature humaine que je crois gagné” hschlegel mer 08/10/2025 - 15:00 En savoir plus sur Robert Badinter : “L’abolition de la peine de mort est un pari sur la nature humaine que je crois gagné” À l’occasion de la cérémonie pour l’entrée de l’ancien garde des Sceaux au Panthéon, ce jeudi 9 octobre, nous vous proposons de retrouver les entretiens qu’il nous a accordés au fil des années, où il revient avec force sur les arguments philosophiques contre la peine de mort ainsi que sur la capacité des hommes à conserver leur dignité face au mal. Mais aussi sur sa rencontre avec le philosophe Michel Foucault. [CTA1]   Foucault, Beccaria, Rousseau, Arendt… Quand Robert Badinter (1928-2024) portait la contradiction aux philosophes : “La justice ressemble à un théâtre, sauf qu’au tribunal, le dénouement n’est pas écrit à l’avance” : pour l’ancien ministre de la Justice, la conscience morale “a la force d’un tribunal” Entretien exceptionnel : comment fonder philosophiquement l’abolition de la peine de mort ? In memoriam : Badinter parle de son camarade Michel Foucault, aux côtés de huit intellectuels octobre 2025
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Avec les réseaux sociaux, l’homme est devenu un “troll” pour l’homme
Avec les réseaux sociaux, l’homme est devenu un “troll” pour l’homme hschlegel mer 08/10/2025 - 12:00 En savoir plus sur Avec les réseaux sociaux, l’homme est devenu un “troll” pour l’homme Sous les traits de Donald Trump, du militant masculiniste, pro-Poutine ou néo-féministe, le petit monstre de la mythologie scandinave est devenu un acteur central de l’espace politique à l’âge numérique où l’indignation supplante la raison et l’attaque remplace l’argument. Explications avec le philosophe Valentin Husson, qui vient de lui consacrer un essai, Foules ressentimentales. Petite philosophie des trolls (Philosophie magazine Éditeur). [CTA2]   ➤ Cet article est exceptionnellement proposé en accès libre. Pour lire tous les textes publiés chaque jour en exclusivité sur philomag.com, avoir accès au mensuel et aux archives en ligne, abonnez-vous à partir de 1€/mois.   Un spectre hante le monde : celui du troll. S’il fut d’abord une figure drôle, interrompant de manière impromptue un débat pour le tourner en dérision, en montrer la vanité et l’absurdité, il est aujourd’hui devenu un phénomène politique préoccupant et redistribuant les cartes des enjeux de pouvoir. Symptôme de notre époque, il raconte quelque chose de notre temps présent, de ses troubles et de sa radicalité. À chaque fois, qu’il soit idéologisé ou non, il manifeste le mal du siècle : celui du ressentiment. L’aigreur est telle qu’elle fait naître toutes les haines. Du troll le plus courant, inscrit désormais dans la pop culture, à ceux politiques, s’y intéresser, c’est faire le récit, en creux, du malaise fondamental de notre culture. ➤ À lire en accès libre : un extrait de Foules ressentimentales. Petite philosophie des trolls On pourrait brosser le portrait-robot du troll d’Internet dans sa dimension la plus commune : s’il est bien un être humain à part entière, sa photo de profil est souvent un animal ou un personnage mythologique. Il grogne comme ces personnages fantastiques ; il est ce que la nuisance sonore est à la musique. Il traîne sur les réseaux et les forums, toujours à l’affût du moindre mot équivoque qu’il pourrait venir soupçonner, souligner, pour alourdir le débat et irriter la communauté qui y dialogue. Il cherche à se faire remarquer, parfois en faisant marrer la galerie, parfois en horripilant celle-ci. Pour se rendre intéressant, le plus souvent, il souligne le peu d’intérêt de ce que nous disons. Il cherche à nous déstabiliser, à nous faire perdre notre sang-froid. S’il nous suit sur les réseaux, c’est pour nous poursuivre, ou nous hameçonner de son mot blessant. Incarnation de l’hostilité de la nature humaine, l’homme est, depuis l’invention des réseaux asociaux, un troll pour l’homme.  “Le troll manifeste le mal du siècle : le ressentiment. Il est l’expression du malaise fondamental de notre culture” Valentin Husson   Ce troll, inscrit dans notre pop culture, nous le connaissons tous, mais il peut prendre des visages plus singuliers ou spécifiques. Deux d’entre eux, qui captent l’attention et qui naissent d’une même radicalisation du débat, nous intéresseront. Celui politique – avec le cas de Trump – et ceux qui, au cœur de ce grand trolling mondial, s’y affrontent comme deux meilleurs ennemis cristallisant le populisme trumpien : le troll néo-féministe et masculiniste.  De quel trolling Trump est-il le nom ? Ses effets d’annonce consistent à créer le scandale, à choquer l’opinion publique pour capter l’attention. Son élection en 2016 et en 2024 tient, pour une part, à ce troll constant. Partant du principe : qu’il n’y a pas de mauvaise publicité, Trump considère que l’essentiel est qu’on parle de lui, qu’importe si ses propos sont farfelus, fallacieux ou mensongers. Sa coupe de cheveux elle-même, son teint orangé sont à eux seuls des modes de trolling spécifiques qui portent à la caricature, c’est-à-dire à la diffusion massive de l’image de Trump. S’il est un piètre politique, il est un incontestable génie de la communication. Et cette manière de faire a des rejetons désormais : une armée entière de trolls est derrière lui et a, sur le web, lancé notamment des campagnes de déstabilisation des différents candidats qui lui étaient opposés. L’ancien troll – qui visait la provocation – rencontre le nouveau troll : celui de la manipulation de masse. Ses coups d’éclat médiatiques influencent l’opinion : son populisme est une manipulation du collectif. “Le troll traîne sur les réseaux et les forums, toujours à l’affût du moindre mot équivoque qu’il pourrait venir soupçonner, souligner, pour alourdir le débat et irriter la communauté qui y dialogue” Valentin Husson   La trumpisation du monde, largement soutenue par son premier supporter Elon Musk, est une vaste tromperie du monde. Toute chose est transformée en événement, et nommément en événement médiatique. Trump fait de la politique comme l’on crée une série : l’intrigue est construite à partir de péripéties, et on la suit d’épisode en épisode. Les images et les paroles ont plus de poids désormais que les actes. Quand dire, c’est faire ; ou quand faire une image, c’est agir.  En anglais existe le terme, difficilement traduisible en français, de gaslighting. Littéralement, l’« illumination au gaz » : le délire causé par l’inhalation d’un produit qui nous fait perdre les esprits et déforme la réalité. Ce concept désigne le fait de manipuler mentalement quelqu’un en lui donnant une information erronée ou fausse, afin de le faire douter de sa mémoire ou de sa perception du réel au profit de l’abuseur, qui renforce là son autorité. Le gaslighting est donc une utilisation de l’infaux à des fins manipulatoires.  Avec la réélection de Trump, un nouveau courant est arrivé au pouvoir : le masculinisme. Ce courant se définit par sa misogynie, son antiféminisme, son virilisme et son caractère androcentré et réactionnaire. Les hommes masculinistes regrettent les temps passés où l’homme était au centre de la société et du foyer et où la femme – subalterne – en était la bonne à tout faire. Ce mouvement a pour corollaire celui des « Trad Wives » dans lequel des femmes, en accord avec ce masculinisme, revendiquent le droit et le devoir de revenir aux valeurs traditionnelles de domesticité. Ce masculinisme est une part importante du trolling contemporain : les hommes cherchent querelle aux femmes en ravivant des positions réactionnaires et une distribution inégalitaire des places dans la société. La femme aurait comme place celle de la femme au foyer aux petits soins pour son mari ; et l’homme aurait comme position celle de ramener l’argent à la maison et de faire vivre la famille. “L’ancien troll – qui visait la provocation – rencontre aujourd’hui le nouveau troll : celui de la manipulation de masse” Valentin Husson   D’où viennent-ils, ces trolls masculinistes ? Ils sont une réaction au mouvement #MeToo. Ces hommes, blessés dans leur virilité par un mouvement féministe qui dénonce les violences dont elles sont victimes par des mâles se croyant tout permis, ont trouvé refuge dans une idéologie réaffirmant leur puissance. La lutte des classes a été remplacée par une lutte des sexes ou des genres. La fêlure narcissique a dû être compensée par un surjeu de l’identité masculine : il faut pousser de la fonte, manger beaucoup de viande, renouer avec la primitivité du chasseur, en revenir à la cruauté qui a toujours été l’apanage du chef de tribu, reprendre un ton guerrier et se préparer à une guerre prochaine.  Il ne faut pas mésestimer – pour être juste, c’est-à-dire pour penser avec justesse – que le phénomène du trolling a aussi été féminin durant toute la période de #MeToo : les accusations ou les rumeurs sans autre forme de procès colportées sur les réseaux – le fameux tribunal médiatique – ont participé au ressentiment ambiant. Toute révolution a sa radicalité, mais toute révolution entraîne toujours sa contre-révolution. Et le masculinisme est la restauration de l’ordre ancien en réponse à l’angoisse et au trouble de l’identité que certains hommes ont pu ressentir intimement. S’il n’y a pas de relation de cause à effet, il y a bien une lame de fond où le néo-féminisme entre en écho – et inversement – avec le masculinisme. Ce sont en tous les cas ces deux discours qui s’écharpent et s’escriment en commentaires des réseaux sociaux. Ils se répondent, parce qu’ils correspondent au même esprit du temps dont ils sont la manifestation : une fracture politique prenant alors celle d’une scission entre les genres, et une extrémisation des positions de chacun.  Toutes ces manifestations font apparaître que le troll est le nom d’une radicalisation inquiétante qui traduit le symptôme de notre temps. La raison se dissipe au profit de l’indignation ; et l’argument au profit de l’attaque. Le dissensus a remplacé le dialogue. Le troll – de celui des réseaux à Trump, en passant par les néoféministes et masculinistes – est l’esprit de notre temps, notre Zeitgeist.   Foules ressentimentales. Petite philosophie des trolls, de Valentin Husson, vient de paraître chez Philosophie magazine Éditeur. 216 p., 19,50€, disponible ici. octobre 2025
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Catherine Malabou : “Face à l'extrême droite, il est possible d’élaborer une certaine plasticité insurrectionnelle dans les marges du pouvoir” www.philomag.com/articles/cat...
Catherine Malabou : “Face à l'extrême droite, il est possible d’élaborer une certaine plasticité insurrectionnelle dans les marges du pouvoir”
Catherine Malabou : “Face à l'extrême droite, il est possible d’élaborer une certaine plasticité insurrectionnelle dans les marges du pouvoir” nfoiry mer 08/10/2025 - 08:00 En savoir plus sur Catherine Malabou : “Face à l'extrême droite, il est possible d’élaborer une certaine plasticité insurrectionnelle dans les marges du pouvoir” Dans notre tout nouveau numéro consacré à l’engagement, nous avons demandé à cinq penseurs ce qu’ils et elles feraient si le Rassemblement national arrivait au pouvoir en 2027. Inspirée par la tradition anarchiste, la philosophe Catherine Malabou prône une désertion active, qui devra se donner pour but de créer des lieux parallèles d’échange et de diffusion des savoirs. [CTA2] « Si vous m’aviez posé la question avant les élections de 2022, je vous aurais peut-être répondu que j’aurais songé à quitter la France pour aller vivre aux États-Unis, où j’enseigne régulièrement. Mais les États-Unis ne me paraissent plus un refuge, leur situation est même pire. Partir, certes, mais pour aller où ? À l’issue d’un long processus de décomposition démocratique, le monde est en train de sombrer dans l’autoritarisme et le fascisme, tandis que les politiques xénophobes se multiplient. Dans ce contexte, que faire ? J’avoue que je ne crois pas tellement aux instruments classiques de la lutte politique, aux partis et aux syndicats. Par contre, la tradition anarchiste enseigne qu’il est possible d’élaborer une certaine plasticité insurrectionnelle dans les marges du pouvoir. Concrètement, je pense que les associations loi de 1901 sont de bons outils pour mettre en place des réseaux de vigilance mais aussi pour venir en aide aux personnes qui vont être visées par les politiques d’extrême droite, comme les sans-papiers ou les immigrés. Je pense donc que je participerai activement à des initiatives d’entraide associative. Le second point qui me paraît important, c’est de désinvestir les institutions cooptées, c’est-à-dire de refuser systématiquement de participer aux organisations ou aux événements pilotés par le RN. J’appelle à une désertion active, qui devra se donner pour but de créer des lieux parallèles d’échange et de diffusion des savoirs. Les penseurs anarchistes m’accompagnent et ne cessent d’alimenter ma réflexion politique, notamment Kropotkine pour l’entraide et Proudhon pour la défense des communs. Cependant, je dois remarquer que les extrêmes droites contemporaines, notamment le RN et Donald Trump, empruntent beaucoup à la tradition anarchiste. Chez eux, cela donne le libertarianisme, la volonté de limiter l’État à ses fonctions régaliennes, le congé donné aux fonctionnaires – mais également l’ubérisation généralisée de la société, l’idée que chacun peut devenir son propre entrepreneur. La gauche se refuse à faire la critique de la démocratie parlementaire, et l’extrême droite ne craint pas de le faire, comme autrefois les anarchistes. Cette situation rend la lutte plus difficile. Prenez un mot comme “liberté” ou “liberté d’expression”. Un sympathisant d’Elon Musk ou de Marine Le Pen pourront vous dire qu’ils les défendent. En fait, il faut faire la distinction entre l’anarchisme individualiste, comme style de vie, et l’anarchisme socialiste, fondé sur la coopération et l’entraide. Il faut toute une pédagogie en philosophie politique pour faire comprendre que l’anarchisme n’est pas le chacun pour soi mais une façon différente de faire société. » octobre 2025
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Dans notre nouveau numéro consacré à l’engagement, cinq penseurs nous confient ce qu’ils feraient si le RN arrivait au pouvoir en 2027. Pour Raphaël Enthoven, le projet de l’extrême droite doit être combattu pied à pied, ce qui ne va pas sans prendre quelques coups… ni nourrir quelques regrets.
Raphaël Enthoven : “Si demain les acquis démocratiques sont menacés, vous ferez comme moi, vous descendrez dans l’arène”
Dans notre tout nouveau numéro consacré à l’engagement, nous avons demandé à cinq penseurs ce qu’ils et elles feraient si le Rassemblement national arrivait au…
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Le sentiment d’être méprisé est le nouveau poison qui ronge nos démocraties. Les gouvernants sont-ils pour autant plus méprisants qu’autrefois ? Nos revendications ont en tout cas changé, dans une société censément égalitaire…
➤ Clara Degiovanni a lu l’essai du mois: “Le Mépris”, de François Dubet.
“Le Mépris”, de François Dubet : touche pas à mon estime ! | Philosophie magazine
Il est discret, le mépris. Il se glisse dans un silence railleur, un froncement de sourcils, une pique sur la tenue, l’accent, la manière d’être… Et pourtant, …
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Les fantômes de la République
Les fantômes de la République hschlegel mar 07/10/2025 - 18:37 En savoir plus sur Les fantômes de la République « Un gouvernement de revenants avec la durée de vie d’un ectoplasme : c’est le scénario plutôt divertissant et riche en rebondissements que nous propose la classe politique ces derniers jours… [CTA1] ➤ Vous lisez actuellement la Lettre de la rédaction de Philosophie magazine. Pour la recevoir directement dans votre boîte mail, abonnez-vous ! Cette newsletter est quotidienne et gratuite. Et si la France n’avait pas besoin d’un énième homme providentiel, ou même plus modestement d’un habile négociateur, mais plutôt de l’équipe de chasseurs des Ghostbusters ? Car il se pourrait bien qu’il lui faille s’alléger de quelques fantômes. Les fantômes sont en effet nombreux à s’agiter ces dernières heures. On ne citera que ceux dont on est sûre qu’ils appartiennent bien au domaine des morts, de peur de paraître insultante – Éric Woerth, sérieusement ? Et pourquoi pas Jérôme Cahuzac tant qu’on y est ? Il y a d’abord celui bien familier du général de Gaulle, convoqué à toutes les sauces politiques de la gauche à l’extrême droite, au point que le képi de l’ancien président doit sentir le chimichurri. C’est Olivier Faure qui salue sur X la démission “avec dignité et honneur” de l’éphémère Premier ministre Sébastien Lecornu, en qualifiant ce dernier de “gaulliste”, taclant au passage celui qui ne l’est donc pas – suivez son regard. Suivons-le donc : c’est encore Emmanuel Macron, qui joue la solitude de la prise de décision en arpentant les quais de Seine à la vue de tous, silhouette courbée sous le poids d’un grand manteau noir. Il a fait gris à Paris hier, uniformément gris : un temps digne des paysages d’Irlande que le général a parcourus seul… après sa démission. Sur cette Ve République qui ne sait que faire de l’absence de majorité absolue au Parlement, son ombre plane, tel un couvercle paralysant. Toucher à son œuvre relève du tabou : il fut un temps où certains candidats à l’élection présidentielle osaient évoquer une VIe République ; désormais, chacun semble très bien s’accommoder de la personnalisation du pouvoir. Loin d’être une source d’inspiration ou des guides pour l’avenir, les fantômes peuvent toutefois s’avérer de véritables boulets, comme en témoigne le metteur en scène russe Kirill Serebrennikov dans sa réinterprétation du Hamlet de Shakespeare au théâtre du Châtelet jusqu’au 19 octobre. Le fantôme du père, figure de pouvoir déchu, ne lâche jamais la grappe du jeune Hamlet en lui serinant : “Souviens-toi de moi !” Hamlet finit par sombrer dans une forme de folie, forcé de se dédoubler pour survivre au vacarme qui lui fracasse la tête. Ce que Serebrennikov montre, c’est qu’à trop les invoquer, les fantômes finissent par nous intoxiquer. De souvenir réconfortant, témoin d’un glorieux passé, ils se muent en sanglots vengeurs qui réclament toujours plus de sursis, au risque de provoquer l’injustice parmi les vivants. Pourtant, impossible de se débarrasser totalement des spectres. À vrai dire, ce n’est même pas vraiment nécessaire. Voilà tout l’objet du recueil de nouvelles de la romancière argentine Mariana Enríquez, Un lieu ensoleillé pour personnes sombres, paru la semaine dernière aux Éditions du Sous-sol. La première s’ouvre sur l’histoire d’Emma, une médecin qui refuse de quitter son quartier, pourtant rongé par la violence, parce qu’il est peuplé de fantômes avec lesquels elle parvient à bavarder, notamment celui de sa mère. “Une morte peut-elle vivre ?”, s’interroge-t-elle. “Elle est présente alors. Depuis que je l’ai découverte, je comprends mieux le mot. Je l’ai sentie avant de la voir.” D’aucun de ces fantômes sollicitant son attention, il ne vient à l’idée d’Emma de singer l’attitude ou l’apparence – pas de grand manteau noir pour un docteur en blouse blanche. Elle se permet même parfois de les envoyer gentiment balader, en leur demandant de baisser d’un ton et d’arrêter de hurler. Une conception du fantôme qui n’est pas loin de celle de l’anthropologue Grégory Delaplace. Dans La Voix des fantômes (Seuil, 2024), il remarque que les fantômes ont certes une forme d’agentivité, mais qu’“ils ne peuvent tenir tout seuls dans le monde” sans la médiation culturelle, sociale et anthropologique des vivants. Dans le même temps, ils ne sont pas entièrement passifs, dans le sens où “ils se [plieraient] sans broncher aux entreprises humaines au service desquelles ils ont été façonnés.” Pas facile à naviguer, le revenant. Mais que faire si le fantôme qui se tait laisse un vide trop grand ? Eh bien, renouvelons nos imaginaires ! Avant-hier, la secrétaire nationale des Écologistes Marine Tondelier confessait sur BFMTV laver parfois ses hauts à l’arrache dans un évier du local d’EELV, pour les faire ensuite sécher sur un cintre. Certes, c’est moins sexy qu’un type en uniforme et en képi. Mais ça fera marrer les fantômes de toutes nos grands-mères lavandières. » octobre 2025
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La “French Theory”, récit en BD d’une aventure franco-américaine
La “French Theory”, récit en BD d’une aventure franco-américaine hschlegel mar 07/10/2025 - 16:00 En savoir plus sur La “French Theory”, récit en BD d’une aventure franco-américaine Dénoncée par les uns comme un « virus » du wokisme, elle apparaît aux autres comme le ferment d’une grande révolution philosophique qui a essaimé dans les luttes féministes et décoloniales contemporaines. L’historien des idées François Cusset, qui publie avec le dessinateur Thomas Daquin French Theory. Itinéraires d’une pensée rebelle (La Découverte/Delcourt), nous raconte en 6 planches commentées l’histoire de ce courant, en France et aux États-Unis, et sa postérité politique.  [CTA2] Définir la raison et la normalité par la mise à l’écart des fous et des anormaux French Theory. Itinéraires d’une pensée rebelle, de François Cusset et Thomas Daquin, p. 75. © Éditions Delcourt/La Découverte [Afficher l’image] François Cusset : Il n’est pas aisé de trouver une cohérence conceptuelle ou un corps doctrinaire à ce que l’on a appelé la « French Theory ». Ses auteurs emblématiques, comme Michel Foucault, Gilles Deleuze, Jacques Derrida ou encore Jean Baudrillard, ont été en désaccord sur presque tout. On peut dire qu’ils ont produit une pensée en rupture avec l’essentiel de l’histoire de la philosophie : critique de la métaphysique, critique de l’histoire, du sujet comme entité fixe, du substantialisme en général. Tout cela au profit d’une pensée plus dynamique, relationnelle, processuelle. Si je résume à grands traits la thèse de Deleuze, Différence et répétition (PUF, 1968), la différence n’est plus un concept déduit mais un processus ininterrompu. Elle n’est plus la conséquence négative d’une identité immuable posée comme première mais devient la condition de possibilité d’existence d’une chose qui n’apparaît qu’à la faveur d’un processus permanent de différenciation, de contraste, dans un champ déterminé. Il n’y a pas de substances ou d’entités fixes – à la place, il y a des écarts, des devenirs, des dérives. Voilà l’opération intellectuelle majeure de la « French Theory ». Évidemment, à partir du moment où l’on prend conscience que le récit historique comme les concepts de l’anthropologie reposent sur des constructions situées dont le processus est – entre autres – déterminé culturellement, c’est tout l’héritage antérieur qui s’en retrouve déstabilisé, mis en danger. Il n’y a plus de droite raison. Au centre de la pensée du pouvoir d’un Michel Foucault, on a ainsi cette opération contre-intuitive consistant à faire dériver la rationalité moderne de l’exclusion sociale de la folie, l’être normal et rationnel du geste de mise à l’écart des anormaux. Explorer le monde de la nuit et de l’“underground” French Theory. Itinéraires d’une pensée rebelle, de François Cusset et Thomas Daquin, p. 45. © Éditions Delcourt/La Découverte [Afficher l’image] F. C. : Dans son essor américain, la « French Theory » a pu être associée un temps au monde de la nuit, aux explorations spirituelles, aux psychotropes, à la culture underground. Il y a cette planche où le passeur Sylvère Lotringer fait lire Présentation de Sacher-Masoch de Deleuze à des dominas dans un club BDSM de New York. Nous racontons aussi l’expérience de Michel Foucault sous LSD dans la Vallée de la mort en Californie en 1975. De façon générale, entre la critique de la norme chez Foucault, le renversement de la métaphysique chez Derrida et le lexique de science-fiction qu’on trouve chez Deleuze et Guattari, le ton philosophique est atypique, anti-institutionnel, d’enjeu existentiel. La « French Theory » a inspiré des esprits singuliers, comme Hakim Bey avec ses zones d’autonomie temporaire, des îlots contestataires où, pour un temps, on invente d’autres modes de vie collective. L’œuvre des penseurs post-structuralistes se prête enfin aux fragments, au prélèvement d’aphorismes forts et de citations provocatrices, qu’on mobilise plus facilement dans les expériences communautaires, contre-culturelles, festives, que s’il fallait en faire une lecture exhaustive comme pour une dissertation. La voie des singularités et des minorités French Theory. Itinéraires d’une pensée rebelle, de François Cusset et Thomas Daquin, p. 97. © Éditions Delcourt/La Découverte [Afficher l’image] F. C. : Les penseurs de la « French Theory » étaient assez liés aux mouvements sociaux de leur temps, notamment en défense des minorités opprimées. Quand il y avait des manifestations pour les immigrés à la Goutte d’Or, ils y étaient. Il n’est pas étonnant qu’ils aient eu une postérité politique. Mais ils se sont toujours tenus à distance du marxisme, ce qui leur a été reproché par les marxistes américains qui ont accusé la « French Theory » d’avoir enterré la lutte des classes, comme si les questions de genre, de rapports Nord-Sud, de conflits d’identités nous avaient fait perdre de vue la défense du prolétariat et l’horizon révolutionnaire. Pourtant, quand l’opposition marxiste s’est retrouvée isolée, en déclin, à partir de la fin des années 1980, ces intellectuels ont justement été perçus comme un recours critique possible, même s’ils refusaient d’être des portes-voix, que ce soit de la contre-culture ou des militantismes de leur époque. Nous avons imaginé une scène où un jeune gay californien remercie Michel Foucault pour son émancipation. Ce dernier prend tout de suite ses distances : il n’a jamais voulu forger de nouvelles catégories normalisatrices pour émanciper une quelconque minorité sexuelle. C’est le genre de malentendus qui a eu aussi des conséquences merveilleuses : vive les malentendus ! Des concepts… qu’on retrouve sur les slogans des manifs aujourd’hui French Theory. Itinéraires d’une pensée rebelle, de François Cusset et Thomas Daquin, p. 186. © Éditions Delcourt/La Découverte [Afficher l’image] F. C. : Ce qui m’étonne le plus, c’est de se retrouver un demi-siècle après les débuts de la « French Theory » et de constater que ses auteurs sont mobilisés par les jeunes générations pour exprimer leurs angoisses et leurs soucis politiques, bien plus que les intellectuels actuels ou les arsenaux politiques classiques, comme le marxisme ou l’écologie radicale. Aujourd’hui, les jeunes qui vivent dans des squats et s’intéressent à la philosophie ont l’air d’avoir plutôt lu Deleuze ou Foucault, même par bribes – au moins de voir qui ils sont – plutôt que les grandes figures de la tradition métaphysique. Les penseurs de la « French Theory » n’ont jamais voulu produire une doctrine philosophique et politique unitaire mais, des décennies plus tard, leurs concepts ont bien des effets politiques chez leurs jeunes lecteurs. Elle a permis, par exemple, d’articuler un marxisme non-orthodoxe à la défense des minorités, la lutte des classes à la question des discriminations. Quand on se balade dans les manifestations aujourd’hui en France, on voit ces liens se faire, des syndicalistes arborer des slogans féministes ou décoloniaux. Pendant ce temps, la gauche sociale-démocrate, plus conservatrice, converge avec les réactionnaires et la droite pour diaboliser la « French Theory », la désigner comme un « virus » qui serait à l’origine du soi-disant « wokisme », pour reprendre le mot de Jean-Michel Blanquer au colloque de la Sorbonne « Après la déconstruction ». Retour à l’envoyeur ou la ruse de la géopolitique intellectuelle French Theory. Itinéraires d’une pensée rebelle, de François Cusset et Thomas Daquin, p. 203. © Éditions Delcourt/La Découverte [Afficher l’image] F. C. : Ces hybridations entre marxisme et théories minoritaires, encore rares et difficiles, ont eu lieu aux États-Unis plus facilement qu’en France. Dans les années 1970 et 1980, le champ intellectuel français, lui, a marginalisé l’héritage de la « French Theory », isolé ses réseaux de recherche. L’université française est passée d’un marxisme spontané à un anti-marxisme très virulent, qui a amputé plus largement cette capacité à renouveler notre arsenal conceptuel critique. Les États-Unis, par leur système universitaire privé et enclavé, ont ménagé, eux, des espaces où l’on pouvait penser et pratiquer la radicalité, au sein des facultés. C’est ce qui fait qu’un penseur comme Fredric Jameson a pu développer une œuvre importante dans le pays de la « peur rouge » et du FBI. En France, au même moment, le champ médiatique et éditorial était saturé par les invectives des nouveaux philosophes. Mais il y a une ruse de la géopolitique intellectuelle, une ironie du destin. Après avoir exporté la « French Theory » aux États-Unis sans le savoir, voilà que la France découvre la dernière les auteurs américains qui s’en étaient inspirés, enfin traduits en français depuis une quinzaine d’années : Judith Butler, Gayatri Spivak, Edward Saïd, Eve K. Sedgwick…   French Theory. Itinéraires d’une pensée rebelle, de François Cusset et Thomas Daquin, vient de paraître aux Éditions La Découverte/Delcourt. Bande dessinée, 24,50€, disponible ici. octobre 2025
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Raphaël Enthoven : “Si demain les acquis démocratiques sont menacés, vous ferez comme moi, vous descendrez dans l’arène” www.philomag.com/articles/rap...
Raphaël Enthoven : “Si demain les acquis démocratiques sont menacés, vous ferez comme moi, vous descendrez dans l’arène”
Raphaël Enthoven : “Si demain les acquis démocratiques sont menacés, vous ferez comme moi, vous descendrez dans l’arène” nfoiry mar 07/10/2025 - 08:00 En savoir plus sur Raphaël Enthoven : “Si demain les acquis démocratiques sont menacés, vous ferez comme moi, vous descendrez dans l’arène” Dans notre tout nouveau numéro consacré à l’engagement, nous avons demandé à cinq penseurs ce qu’ils et elles feraient si le Rassemblement national arrivait au pouvoir en 2027, question d'autant plus brûlante depuis la démission du Premier ministre Sébastien Lecornu et une possible dissolution de l’Assemblée nationale. Pour Raphaël Enthoven, le projet du parti d’extrême droite, mélange de populisme et d’illibéralisme, doit être combattu pied à pied, ce qui ne va pas sans prendre quelques coups… ni nourrir quelques regrets. [CTA2] « Si le RN arrive au pouvoir, je ne changerai rien à ma vie quotidienne. J’ai mis trop de temps à me constituer une sorte de quartier général où travailler pour y renoncer au motif que le résultat de la présidentielle me déplaît. Par ailleurs, je profiterai de la liberté d’expression que la loi me garantit, et je surinvestirai Franc-Tireur. La raison d’être de cet hebdomadaire est de conjurer l’arrivée des extrêmes au pouvoir, qu’ils soient de gauche ou de droite. Une mutation de la vie politique s’est en effet produite entre le rejet par référendum du projet de Constitution européenne en 2005 et la première élection d’Emmanuel Macron en 2017. Le binôme traditionnel gauche-droite est devenu inopérant. Il a disparu au profit d’un autre binôme, celui du clos et de l’ouvert. C’est Bergson, dans Les Deux Sources de la morale et de la religion, qui pense dès 1932 le paradigme du clos et de l’ouvert : une société close est à la fois hiérarchique, défensive, fondée sur l’appartenance, mue par une morale conservatrice et encadrée par des règles destinées à maintenir sa cohésion. Une société ouverte est universelle et dynamique. Elle ne repose pas sur l’appartenance mais sur l’ouverture à l’humanité dans son ensemble. Le RN me semble être le mandataire de la clôture, et le mélange de populisme et d’illibéralisme qui constitue son projet doit être combattu pied à pied. Je me suis longtemps présenté comme un professeur de philosophie, au-dessus de la mêlée. Et puis après les attentats de 2015, j’ai considéré qu’une guerre était déclarée, que la liberté de blasphémer, donc la liberté d’expression et les valeurs démocratiques étaient attaquées, et je suis descendu dans l’arène. J’ai fini par penser que, comme Zarathoustra, on s’élève quand on consent à descendre de sa colline. J’ai compris que ce que je tenais jusque-là pour des acquis – les libertés fondamentales, la République – ne l’était pas. Mais j’ai commis une erreur, une sorte de suicide public. Avant les élections de 2022, à l’issue d’une série de Tweet, je renvoyais dos à dos les projets de Jean-Luc Mélenchon et de Marine Le Pen, j’ai écrit : “S’il fallait choisir entre les deux, et si le vote blanc n’était pas une option, j’irais à 19h59 voter pour Marine Le Pen en me disant, sans y croire, ‘plutôt Trump que Chávez’.” Je regrette profondément cette phrase, parce que si la situation se produit réellement, quoi que je pense des abstentionnistes, je ne voterai pas. Avoir écrit ces mots est ma croix. Désormais, je dois vivre avec ça. Ce qui me donne de l’espoir, finalement, c’est que les libertés sont plus difficiles à maintenir qu’à défendre. Si vous n’êtes pas engagé vous-même, si vous ne faites pas de politique, c’est que vous estimez que votre situation est confortable. Vous vous endormez sur les acquis démocratiques. Mais si demain ceux-ci sont menacés, vous ferez comme moi, vous descendrez dans l’arène, et forcément vous y recevrez quelques coups. » octobre 2025
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La démission du Premier ministre Sébastien Lecornu, à la tête du gouvernement le plus bref depuis plus d’un siècle, rend envisageable une nouvelle dissolution de l’Assemblée et l’accès du RN au pouvoir. Dans cette circonstance, que feraient les philosophes ? Aujourd’hui, la réponse de Frédéric Gros.
Frédéric Gros : “Le RN au pouvoir, est-ce que ce n’est pas déjà en train d’arriver ?”
Alors que la démission du Premier ministre Sebastien Lecornu, trois semaines après avoir été nommé par le président de la République, ouvre la voie à l…
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La nuit de Varenne
La nuit de Varenne hschlegel lun 06/10/2025 - 18:34 En savoir plus sur La nuit de Varenne « Depuis une dizaine de jours, dit-on, la rue de Varenne à Paris est plongée dans le noir : aucun éclairage public sur cette voie compassée et protégée du faubourg Saint-Germain. Comme si Sébastien Lecornu avait eu besoin d’une obscurité complète pour résoudre l’ultime casse-tête du macronisme. Mais son fiat lux n’aura duré que quelques heures, le temps d’une nuit qui restera peut-être dans l’histoire comme celle où l’Ancien Régime a basculé pour l’inconnu.  [CTA1] ➤ Vous lisez actuellement la Lettre de la rédaction de Philosophie magazine. Pour la recevoir directement dans votre boîte mail, abonnez-vous ! Cette newsletter est quotidienne et gratuite. Dans La Nuit de Varennes, le cinéaste Ettore Scola raconte la fuite ratée de Louis XVI hors du Paris révolutionnaire en 1791. C’est une bonne histoire et un épisode marquant de la séquence révolutionnaire. Mais, comme souvent, les péripéties dissimulent l’essentiel. C’est la même chose aujourd’hui. Les déclarations des uns et des autres, les rivalités politiques, les jeux d’appareil envahissent l’espace médiatique. Sur le long terme, pourtant, une ligne claire se dégage. Chacun se demande si une nouvelle dissolution va survenir. Mais elle a déjà eu lieu, et pas uniquement l’année dernière ! Regardons les définitions du dictionnaire. Une dissolution est la “désagrégation d’un organisme s’effectuant par la séparation et la dispersion de ses éléments constituants” (Trésor de la langue française). Nous en sommes là depuis pas mal de temps, à la fois dans la société, nerveuse et divisée comme jamais, et dans un parlement divisé en blocs irréconciliables. Dans un sens plus moral, le terme de dissolution renvoie à un “affaiblissement marqué, [un] anéantissement des forces physique ou des facultés”. Nous y sommes également, puisqu’aucune grande décision engageant l’avenir d’un pays fragilisé n’est prise depuis des mois. Le président nomme à intervalles de plus en plus rapprochés des chefs de gouvernement pour mener sa politique. Ils sont renversés, ou démissionnent avant même de l’être. Non seulement chacun des trois blocs qui constituent l’Assemblée nationale ne peut se mettre d’accord avec les autres, mais ceux-ci sont même divisés en leur sein. Les Républicains se déchirent avec les macronistes. La confiance, c’est le moins qu’on puisse dire, a disparu à gauche. Seul le RN semble uni derrière ses deux chefs. Qu’apporterait une nouvelle dissolution de l’Assemblée ? Si l’on se réfère à la philosophie de l’histoire, la dissolution est la dernière étape avant une recomposition. Chez Hegel, le terme d’Auflösung signifie dissolution. Dans ses Principes de la philosophie du droit (1820), le penseur allemand affirme que la “dissolution de la vie étatique” survient quand les individus se perdent “dans les actes d’opiner et de ratiociner” – tiens tiens, ça rappelle un peu notre situation. Mais, pour lui, le moment destructeur est l’occasion d’une mue positive. Dans d’autres textes du philosophe, le terme d’Auflösung est traduit par résolution. Les contradictions se mélangent dans le négatif avant de se résoudre en quelque chose de neuf. De notre côté du Rhin, à quoi ressemblerait cette dissolution-résolution ? On peut imaginer, pour se rassurer, que le paysage politique ne changera pas tant que ça, et qu’il faudra s’armer de patience pour que l’une des forces l’emporte plus largement à l’occasion de la prochaine élection présidentielle. Mais il y a une autre hypothèse. De nombreux citoyens sont dégoûtés par les manœuvres de nos politiques et s’abstiendront. Les électeurs de gauche auront sans doute le plus grand mal à ressusciter le Front populaire de 2024. Certains se sont déjà résignés à voir arriver Jordan Bardella à Matignon, en se disant que les Italiens ont bien Giorgia Meloni et que cela ne se passe pas si mal. D’autres, enfin, souhaitent ardemment la victoire du RN. Au fond, les Français sont nombreux à vouloir une résolution radicale. Qu’ils aiment ou détestent le parti lepéniste, ils se disent que seule son accession à Matignon ou à l’Élysée constituerait une épreuve de vérité. Les premiers soutiendront cette victoire de toutes leurs forces. Les seconds la combattront de toute leur âme. Si l’on suit Hegel jusqu’au bout, nos soubresauts politiques insolubles suivent une logique profonde : comme de plus en plus de pays du monde et d’Europe, la France s’apprête à s’engager dans le populisme d’extrême droite. Je ne sais pas si Emmanuel Macron va nommer un Premier ministre de droite soutenu par le RN. S’il va tenter un nouveau salto politique. S’il va dissoudre. Comme Hegel, je crois que le cours des choses nous entraîne, au gré des entêtements, des calculs, des stratagèmes, vers la progression – crainte ou désirée – du lepénisme. Mais contrairement à lui, je pense aussi que l’histoire est faite de contingences et d’imprévus qui peuvent gripper l’implacable logique de la dissolution-résolution. Tout dépend encore du pouvoir d’action des citoyens. La nuit de Varenne ne fait que commencer. » octobre 2025
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La “servitude volontaire” chez La Boétie, c’est quoi ?
La “servitude volontaire” chez La Boétie, c’est quoi ? hschlegel lun 06/10/2025 - 14:59 En savoir plus sur La “servitude volontaire” chez La Boétie, c’est quoi ? C’est une énigme politique doublée d’une contradiction logique que dénonce le jeune Étienne de La Boétie dans son célèbre Contr’un en 1549 : ou comment le peuple peut-il vouloir sa propre servitude ? Nicolas Tenaillon a relu ce texte qui inspira Montaigne, Spinoza et Simone Weil. Il déplie le mille-feuilles de cette domination qui ne tombe pas seulement d’en haut, mais que sécrètent l’habitude, la complicité et le désir du peuple.  [CTA2] ➤ Cet article est exceptionnellement proposé en accès libre. Pour lire tous les textes publiés chaque jour sur philomag.com, avoir un accès illimité au mensuel et soutenir une rédaction 100% indépendante, abonnez-vous ! Retrouvez toutes nos offres ici. Écrit par le tout jeune Étienne de La Boétie (1530-1563) en 1549, mais publié seulement en 1576 dans Le Réveille-matin des Français, pamphlet protestant, le Contr’un ou Discours de la servitude volontaire, est aujourd’hui considéré comme l’un des premiers textes subversifs de la pensée politique française. Mais que cache l’oxymore de son sous-titre ? Comment la servitude pourrait-elle être volontaire ? Loin de voir dans ce choix matière à dénoncer une sorte de masochisme social généralisé, La Boétie, penseur et poète humaniste, délivre par ce réquisitoire plein d’érudition une analyse percutante et lucide des ressorts cachés de l’abus de pouvoir en politique. L’autorité, c’est dans la tête ? Le Contr’un part d’une interrogation tirée d’un constat : « Je désirerais seulement qu’on me fit comprendre comment il se peut que tant d’hommes, tant de villes, tant de nations supportent quelquefois tout d’un Tyran seul, qui n’a de puissance que celle qu’on lui donne. » D’où vient cette fascination pour la monarchie (au sens strict) ? Pas de la nature, répond La Boétie, car si celle-ci nous demande primitivement d’obéir à nos parents, elle n’a pas voulu que nous nous soumettions à une autorité extérieure. Bien au contraire : elle nous a donné la liberté et même le devoir de la conserver. La servitude n’étant pas naturelle en politique, elle ne peut donc être que volontaire : « C’est le peuple qui s’assujettit et se coupe la gorge », lui-même. “La servitude volontaire, c’est le peuple qui lui-même s’assujettit et se coupe la gorge” Étienne de La Boétie   Comment rendre compte d’un tel paradoxe ? Si la peur de la rébellion est sans doute une cause d’explication, elle n’est pas suffisante, car que quatre ou cinq personnes hésitent, cela se comprend. Mais des millions ? La couardise ne va pas jusque-là. Il faut donc chercher d’autres raisons à cette désolante aliénation collective. La Boétie en distingue essentiellement trois. Les trois mamelles de la soumission « La première raison de la servitude volontaire, c’est l’habitude. » Certes, lorsque le pouvoir se met en place et devient abusif, le mal qu’il ne manque pas de commettre pour asseoir son autorité, comme l’avait vu Machiavel, suscite des résistances, souvent violentes. Mais si le pouvoir les surmonte, le peuple, comme un cheval dressé, ne réagit plus. Et en quelques générations, le souvenir de la liberté est habilement effacé des mémoires. “Les hommes qui naissent sous le joug, nourris et élevés dans le servage sans regarder plus avant, se contentent de vivre comme ils sont nés, et ne pensant point avoir d’autres droits, ni d’autres biens que ceux qu’ils ont trouvés à leur entrée dans la vie, ils prennent pour leur état de nature, l’état même de leur naissance” Étienne de La Boétie, op. cit. La seconde raison qui détourne le peuple du souci de sa liberté, c’est, explique La Boétie, la distraction. Pour que la soumission devienne une tradition, il a fallu en effet amollir les sujets rebelles. C’est ce que fit, bien avant les empereurs romains, le grand Cyrus, fondateur au VIe siècle avant Jésus-Christ de l’empire perse. On lui rapporta que la ville de Sardes dans la lointaine Lydie, récemment conquise, risquait de se révolter. Plutôt que d’y maintenir une garnison, ce qui était coûteux en hommes et en argent, Cyrus y établit « des bordaux [des maisons closes], des tavernes et des jeux publics, et fit publier une ordonnance que les habitants eussent à en faire état. » Les gens de Lydie (d’où viendra le mot « ludique » !) y prirent goût, s’amollirent, et « jamais depuis contre les Lydiens il ne fallut tirer un coup d’épée ». “Soyez résolus de ne plus servir, et vous voilà libres” Étienne de La Boétie   Troisième raison enfin : la complicité. Pour consolider son pouvoir, « le tyran asservit les sujets les uns par les autres ». En fabriquant des petits tyrans, il organise une pyramide des intérêts, où tous « trouvent leur plaisir à la servitude, pourvu qu’ils en recueillent quelque profit ». C’est là « le secret et le ressort de la domination, le soutien et le fondement de toute tyrannie ». Mais dès lors, les choses étant ce qu’elles sont, est-il encore envisageable d’échapper à la servitude volontaire ? La Boétie le croyait, et ce sans violence. “Il n’est pas besoin de combattre ce tyran ni de le renverser : il est défait de lui-même, pourvu que le pays ne consente plus à sa servitude” Étienne de La Boétie, ibid. Puisque la force du tyran ne vient que de l’acceptation du peuple, il suffit de la lui retirer : « Soyez résolus de ne plus servir, et vous voilà libres ». Mais avait-il vu juste ? Un pamphlet qui fit florès Anticipant l’avènement de la monarchie absolue en France, le Contr’un fut jugé trop sulfureux par Montaigne, le meilleur ami de La Boétie. L’auteur des Essais, qui évoque cette « déclamation contre la tyrannie » dans « De l’amitié » (Essai I, 28), refusa de la publier. Il fit néanmoins beaucoup pour sa popularité en suggérant que ce réquisitoire, qu’il préférait tenir secret, serait toujours dangereux pour ceux qui gouvernent seuls. De fait, les parlementaires se référèrent à La Boétie lors de l’épisode de la Fronde (1648-1653) contre le pouvoir abusif de Mazarin ; les révolutionnaires de 1789, Camille Desmoulins en tête, s’approprièrent la formule : « Les tyrans ne sont grands que parce que nous sommes à genoux » ; au XIXe siècle, l’anarchiste Élisée Reclus voulut voir en La Boétie un précurseur de la désobéissance civile ; plus près de nous, Simone Weil, dans sa Méditation sur l’obéissance et la liberté (1937), écrivait à propos du mystère de la soumission volontaire : « Il y a près de quatre siècles, le jeune La Boétie, dans son Contre-un, posait la question. » Mais, estimait-elle, « il n’y répondait pas » – parce qu’aux yeux de la disciple d’Alain, l’obéissance devait être maintenue… à condition d’être éclairée et librement consentie. Reste que le succès de pamphlets allant dans le sens originel de La Boétie, comme par exemple celui d’Indignez-vous ! (2010), court essai de Stéphane Hessel vendu à plus de 4 millions d’exemplaires dans le monde, prouve que les peuples aujourd’hui ne restent plus sourds à ceux qui leur rappellent que l’inertie est la meilleure complice des abus d’autorité. Or n’est-ce pas d’abord à la fougue de La Boétie que nous devons d’avoir été alerté sur les causes cachées de notre tendance à laisser faire l’inacceptable au point d’« avaler, sans répugnance, l’amer venin de la servitude » ?  octobre 2025
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Frédéric Gros : “Le RN au pouvoir, est-ce que ce n’est pas déjà en train d’arriver ?”
Frédéric Gros : “Le RN au pouvoir, est-ce que ce n’est pas déjà en train d’arriver ?” nfoiry lun 06/10/2025 - 11:35 En savoir plus sur Frédéric Gros : “Le RN au pouvoir, est-ce que ce n’est pas déjà en train d’arriver ?” Alors que la démission du Premier ministre Sebastien Lecornu, trois semaines après avoir été nommé par le président de la République, ouvre la voie à l’hypothèse d’une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale et d’une arrivée de l’extrême droite au pouvoir, nous avons demandé dans notre nouveau numéro à plusieurs philosophes ce qu’il ferait dans cette circonstance. Aujourd’hui, Frédéric Gros, auteur de Désobéir, défend l’idée d’une action et d’une parole de vérité dans les pas de Michel Foucault et de Hannah Arendt.  [CTA2] Le Rassemblement national est aux portes du pouvoir. Pour moi, cet énoncé représente l’impensable, l’insupportable. Je rappelle que je suis né au milieu des années 1960, et pendant toute ma jeunesse, l’extrême droite, c’étaient les éructations racistes et antisémites de Jean-Marie Le Pen, ainsi que son mépris affiché pour l’État de droit. Que les rejetons de son parti puissent aujourd’hui afficher leur républicanisme et soutenir qu’ils sont le vrai rempart contre l’antisémitisme relève pour moi de la blague absolue – mais elle ne me fait pas rire. Les sondages et les projections de vote obligent pourtant à se poser la question : et s’« ils passent », qu’est-ce que je fais ? Eh bien, je crois que je resterai – provisoirement ? – en France, et, parce que la machine à propagande – déjà bien amorcée sur certaines chaînes d’information en continu – sera à son comble, je tenterai de m’informer auprès de médias alternatifs, au moins pour nourrir ce que Kant appelle un « usage public de la raison », en dénonçant les attaques qui seront inévitablement menées contre la Justice et le Droit. À un niveau plus professionnel, il s’agira évidemment de réaffirmer dans mes cours des principes élémentaires de politique humaniste et de rappeler les désastres provoqués en Europe par les doctrines extrémistes. Tout le problème consistera, selon la belle expression forgée par Michel Foucault dans ses derniers cours au Collège de France, à faire preuve, face aux événements, d’un certain courage de la vérité, c’est-à-dire accepter de prendre des risques en dénonçant les iniquités qui ne manqueront pas de se produire.  Mais tout le problème sera aussi de savoir si et jusqu’à quel point j’en serai effectivement capable sans me réfugier derrière des excuses habituelles et faciles (famille nombreuse, etc.). Sur ce point cependant, qui est celui de la responsabilité au sens peut-être le plus profond d’une réponse personnelle et active face à ce qui se produit, les effets d’annonce sont inutiles. Les plus téméraires en paroles sont comme on le sait les plus pleutres en actes, et l’humilité est la vraie sœur du courage. Hannah Arendt distingue avec beaucoup de force dans sa Condition de l’homme moderne « qui je suis » et « ce que je suis ». « Ce que je suis », ce sont à la fois un statut, un mode de vie, des traits de personnalité… Bref, une certaine identité défendue à travers un parcours de vie. « Qui je suis », seuls l’action et l’événement dans des moments exceptionnels à la fois en décident mais aussi le révèlent. J’espère donc seulement, avec un peu de crainte quand même, que je saurai me montrer à la hauteur de ce qui arrive – la question étant : mais est-ce que ce n’est pas déjà en train d’arriver ? octobre 2025
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